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2024 – Enseignement supérieur et recherche en Europe : les enjeux de l’ancrage territorial des Universités

Vendredi 29 novembre 2024

Faculté de Droit et des Sciences Économiques Amphi 400A – Campus Centre Ville – Limoges

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Avec le soutien de :

 

EUROPA a organisé le vendredi 29 novembre 2024 à Limoges son 28e colloque européen annuel, sur le thème : « Enseignement supérieur et recherche en Europe : les enjeux de l’ancrage territorial des Universités ».


Problématique

L’impact d’une université sur un territoire n’est pas aisément identifiable. Pourtant, la présence d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche dans une ville apporte une dynamique particulière, des formations spécifiques, une vie étudiante, une recherche appliquée, des startup… Mais l’ancrage territorial de ces établissements est-il compatible avec les enjeux européens et internationaux, avec la recherche d’une bonne place dans les classements internationaux, avec le développement d’Alliances européennes ? C’est à ces questions que souhaitait répondre le colloque EUROPA de 2024.

Pour appréhender la thématique, le colloque était organisé autour de trois temps.

Le premier temps était consacré aux questions institutionnelles.

La séance introductive a traité en effet de l’impact de la diversification de plus en plus importante des organisations des acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche en France et en Europe.

L’étude des différents modèles de gouvernance des universités a permis de questionner les typologies d’enseignement supérieur et de recherche en Europe, dans un marché de plus en plus concurrentiel (universités privées, écoles privées…), et des tutelles qui s’exercent.

La question du périmètre pertinent d’une université, de la logique des regroupements et des missions que ces derniers doivent assurer a été également débattue. Faut-il construire une politique universitaire autour d’un établissement unique ou d’un ensemble d’établissements ?

La conception d’une gouvernance agile pour les Universités est aujourd’hui une nécessité pour répondre rapidement aux besoins socio-économiques des territoires. La place des collectivités territoriales et en particulier des Régions et de leurs compétences, en France et en Europe, au sein du service public national est un sujet. La Cour des comptes a souligné, dans son rapport de 2023, que les régions, pourtant chefs de file en matière d’enseignement supérieur depuis la loi NOTRe, mènent leurs propres politiques, sans assurer une bonne coordination avec les autres collectivités, pourtant financeuses elles aussi à des degrés divers.

Le deuxième temps de la réflexion a abordé la nécessité d’une stratégie territoriale pour l’enseignement supérieur et la recherche à inventer dans un contexte de tensions.

L’enseignement supérieur et la recherche se retrouvent au centre de tensions et doivent répondre à la demande des étudiants, des territoires, des forces économiques… Les tensions sont multiples et l’on peut insister sur certaines : la tension entre le local et l’international, la tension entre d’un côté une logique de service public et de différenciation, et d’un autre côté la revendication d’une autonomie indispensable pour dégager des marges de manœuvre ainsi qu’une volonté de se singulariser par une signature spécifique ; la tension entre la nécessité d’une relation directe de proximité et la montée en puissance du numérique et du distanciel ; la tension entre le temps long de la recherche fondamentale financée par des subventions et le temps du financement par des appels à projets ; la tension entre recherche académique et recherche appliquée.

Au-delà de ces différents défis, les rapprochements entre Universités, Collectivités Territoriales et Employeurs sont indispensables et posent la question de l’adaptation face aux différents métiers en tension et de l’attractivité de la fonction publique.

Au final, comment l’Enseignement supérieur et la recherche peut-il concilier des injonctions contradictoires pour mener une politique performante sans se couper des territoires ?

Le troisième et dernier temps du colloque s’est intéressé à l’enseignement supérieur et à la recherche comme élément d’attractivité du territoire.

Il s’est agi ici de déterminer comment les différents acteurs du territoire peuvent, avec l’Université (l’enseignement supérieur), construire une politique d’attractivité via les activités de recherche et d’innovation. Si les missions principales sont constantes dans les différents Etats (formation, recherche, insertion professionnelle…), quelles sont celles qui vont produire de la richesse sur un territoire et renforcer son attractivité ? Cette séquence a permis de s’interroger sur la plus-value qu’apporte l’université à un territoire, sur la richesse qu’elle produit, sur sa contribution à l’emploi et au développement économique, sur le retour sur investissement des dépenses en faveur de l’enseignement supérieur. Elle a été aussi l’occasion de réfléchir à la construction d’un continuum entre formation, apprentissage, lien avec les entreprises et les collectivités, à la réponse aux besoins de formation dans les territoires, à la dynamique qu’un territoire peut retirer de la vie étudiante.

La réflexion générale a porté ainsi sur le modèle économique de l’université pour remplir ses missions et ses liens avec les territoires. Pour traiter ce thème qui dépasse nos frontières, l’association EUROPA a fait appel, comme tous les ans, à des experts français, académiques ou professionnels, mais aussi à son réseau européen, avec des représentants en provenance d’une douzaine de pays membres de l’Union Européenne.


Programme

Séance introductive : Des organisations des acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche de plus en plus diversifiées : quels impacts ?

Le premier temps du colloque était dédié à l’étude des différents modèles de gouvernance des universités, et plus largement de l’enseignement supérieur en Europe en lien avec les enjeux des territoires, du développement européen et international des universités, confrontées à la logique des classements internationaux. Les modèles d’enseignement supérieur sont divers. La France connaît un système dual, Universités et Grandes écoles (avec des classes préparatoires) ; posant la question de la pertinence des choix de gouvernance.

Cette séance introductive était également l’occasion de questionner les typologies d’enseignement supérieur et de recherche en Europe, dans un marché de plus en plus concurrentiel (universités privées, écoles privées…), et des tutelles qui s’exercent (données ETER).

Nous avons interrogé aussi à cette occasion la question du périmètre pertinent d’une université, de la logique des regroupements et des missions que ces derniers doivent assurer. Faut-il construire une politique universitaire autour d’un établissement unique ou d’un ensemble d’établissements ?

La conception d’une gouvernance agile pour les Universités est aujourd’hui une nécessité pour répondre rapidement aux besoins socio-économiques des territoires. La place des collectivités territoriales et en particulier des Régions et de leurs compétences, en France et en Europe, au sein du service public national est un sujet. Le rapport Woerth souhaite renforcer leurs compétences.

Sur ce point, la Cour des comptes, dans son rapport de 2023, soulignait que les moyens versés chaque année par les collectivités territoriales aux universités avoisinaient les 1,5 milliard d’euros. Mais elle dénonçait le fait que les régions, pourtant chefs de file en matière d’enseignement supérieur depuis la loi NOTRe, menaient leurs propres politiques, sans assurer une bonne coordination avec les autres collectivités, pourtant financeuses elles aussi à des degrés divers.

Séance thématique n°1 : Une stratégie territoriale pour l’enseignement supérieur et la recherche à inventer dans un contexte de tensions

L’enseignement supérieur et la recherche se retrouvent au centre de tensions et doivent répondre à la demande des étudiants, des territoires, des forces économiques…

Tension entre le local et l’international : faut-il s’insérer dans une politique territoriale ou privilégier l’international ; faut-il répondre aux défis des métiers en tension sur le territoire ou viser la progression dans les classements internationaux ? Comment réaliser les deux ? Faut-il généraliser l’expérimentation à tout le territoire pour que les établissements répondent aux enjeux, à la spécialisation des territoires ? Les classements internationaux contribuent-ils à l’attractivité du territoire ? De quelle manière ? Les regroupements d’universités au sein d’alliances européennes contribuent-ils à rapprocher les systèmes d’enseignement supérieur, à faire émerger des leaders européens ou à construire des relations entre universités mais aussi entre territoires ?

  • Tension entre d’un côté une logique de service public (des missions identiques pour tous les acteurs de l’ESR conformément au code de l’éducation) et une logique de différenciation, permettant de mieux répondre aux enjeux du territoire, par exemple par la spécialisation des cursus et d’un autre côté la revendication d’une autonomie indispensable pour dégager des marges de manœuvre ainsi qu’une volonté de se singulariser par une signature spécifique, affirmant son originalité ;
  • Tension entre nécessité d’une relation directe de proximité et la montée en puissance du numérique et du distanciel (campus connectés) ; investissement du territoire numérique (plateforme FUN) ;
  • Tension entre le temps long de la recherche fondamentale financée par des subventions et le temps du financement par des appels à projets, différents selon le niveau européen, national ou régional ;
  • Tension entre recherche académique (relevant souvent du national ou de l’international) et recherche appliquée (parfois plus directement utile au territoire) : Quels sont les dispositifs mis en place pour inciter les chercheurs à intervenir davantage dans le monde économique pour valoriser leurs travaux ?

Au-delà de ces différents défis, cette séance thématique était également l’occasion d’aborder les nécessaires rapprochements entre Universités, Collectivités Territoriales et Employeurs dans l’adaptation face aux différents métiers en tension et aux questions d’attractivité de la fonction publique.

Au final, comment l’Enseignement supérieur et la recherche peut-il concilier des  injonctions contradictoires pour mener une politique performante sans se couper des territoires ?

Séance thématique n°2 : L’enseignement supérieur et la recherche comme élément d’attractivité du territoire

Comment les différents acteurs du territoire peuvent-ils, avec l’Université (l’enseignement supérieur) construire une politique d’attractivité via les activités de recherche et d’innovation ?

Si les missions principales sont constantes dans les différents Etats (formation, recherche, insertion professionnelle…), quelles sont celles qui vont produire de la richesse sur un territoire et renforcer son attractivité ? Comment l’université s’inscrit-elle dans un territoire du point de vue économique ? Quelle plus-value lui apporte-t-elle, comment se mesure la richesse qu’elle produit ? La contribution des universités à l’emploi et au développement économique fait l’objet de quelques évaluations, mais le ministère, en France, ne dispose pas d’un document permettant de l’apprécier. Elles seraient pourtant utiles pour calculer le retour sur investissement des dépenses en faveur de l’enseignement supérieur (ainsi quelques universités tentent de le calculer : l’impact économique des universités lilloises serait ainsi de plus de 3 milliards d’euros et 42.000 emplois, via la présence d’étudiants dans la métropole lilloise, les contrats et commandes, les biens et services…).

Comment :

  • inscrire la dynamique de la formation et de la recherche dans un territoire ?
  • construire un continuum entre formation, apprentissage, lien avec les entreprises et les collectivités (appel à projets CMA, enjeux de GPEC) ?
  • répondre aux besoins de formation, essentiellement formation tout au long de la vie… ? Faut-il spécialiser des cursus ou maintenir des cursus généralistes ?
  • irriguer les territoires infra-régionaux en créant des antennes sur les territoires pour renforcer leur attractivité ?
  • tirer partie de la vie étudiante pour renforcer la dynamique du territoire ?

Quel est le modèle économique de l’université pour remplir ses missions (comparer avec les universités privées) ? Financement récurrent, par qui, réponse aux appels à projets ?

L’autonomie des universités est-elle de nature à renforcer leur attractivité ? Acte 2 de l’autonomie ?

Rapport de synthèse : Hélène PAULIAT, Professeur de droit public (OMIJ-Limoges), Présidente d’EUROPA, Présidente Honoraire de l’Université de Limoges